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Expérience douloureuse.

Petit récit d’un moment vécu récemment, que j’avais déjà raconté sur ErgoIHM, suite à un message sur une restitution douloureuse.

Dans le cadre d’un projet de conception d’un site communautaire (Genre forum/linkedin/wiki pour un groupe fermé d’utilisateur), j’ai animé un atelier UX Design pour amener les clients, la MOA a réfléchir sur « Comment impliquer les utilisateurs, leur donner envie de participer ? » et dans un deuxième temps quelles informations mettre sur la page d’accueil. Rien de bien compliquer à première vue, j’ai déjà fait ce genre d’atelier. Le but n’est pas nécessairement de concevoir directement, mais d’écouter, de recueillir les informations et si le groupe fonctionne bien, il y a souvent des besoins ou de bonnes idées qui émergent.

D’autres ateliers, auxquels je n’avais pas participé, avaient eu lieu avant sur différents sujets (Communication, Persona, UserStory) souvent laborieux, voir conflictuel.

Je commence l’atelier par une petite présentation sur le persuasive design, qui correspond au besoin exprimé par la dites MOA, même si bien sûr elle ne l’a pas exprimé comme cela. Jusque-là tout va bien… Je continue en proposant de faire deux groupes pour la suite et de réfléchir chacun de son côté et de partager en suite. Rapidement, on se rend compte que ça ne marche pas. La MOA est passive, elle attend que je donne des solutions… L’ergonome, ce grand magicien,… Je change de stratégie et passe à la page d’accueil avec une demande plus simple : « Qu’est ce que vous voulez voir sur la page d’accueil et selon vous qu’est ce qui sera le plus utilisé ? ». J’avais prévu un zoning avec une colonne de gauche avec le contenu principal et une droite avec les infos secondaires, pour permettre de visualiser la page. Jusque-là tout va presque bien…

On commence par le profil de l’utilisateur, je m’aperçois rapidement que ce que j’ai raconté sur le persuasive design n’est pas intégré. Je propose par exemple d’afficher des badges qui représentent l’activité de l’utilisateur et de surtout de présenter le suivant pour l’inciter à continuer. Refus de la MA « Non, juste un lien vers les badges ». Pas grave, on continue, on arrive au « truc » de la MOA : « une exploration innovante des contenus » en réalité une représentation sous forme de cercle des contenus, et au clic sur un cercle on descend dans l’arborescence (les cercles changent de formes et donc de place en fonction de l’activité de la rubrique). J’essaye d’en savoir plus, de les faire parler, j’évoque les personas qui pour une part ne sont pas super à l’aise avec l’informatique, on propose des variantes… Puis à un moment, je dis simplement, c’est très bien ce mode exploratoire, mais dans le menu, il faut en plus un accès direct à l’arborescence pour un usage quotidien, efficient.

Qu’est ce que je n’avais pas dit ! Réaction immédiate d’un des membres de la MOA, « Non, il faut obliger les utilisateurs à explorer quitte à les freiner dans leur navigation » (je résume…) Je réargumente : utilisateur, persona, bla-bla, efficience, je ne lâche pas le morceau. le chef de projet en met une couche : c’était proposer dans la réponse à l’appel d’offres. Le ton monte. Le gars de la MOA sort fumer une clope avec le chef de projet. Au retour, on passe à la suite. On fait encore deux ou trois zones à remplir.

Il reste un peu de temps en fin de réunion, on aborde le sujet de l’arborescence. J’explique qu’une arborescence large convient mieux qu’une arborescence profonde, et qu’il faut donc la limiter à deux niveaux. Et que pour s’assurer de la pertinence de l’arborescence, il serait intéressant de faire un tri par carte, ce qui est relativement facile dans le cadre du projet, vu qu’on a la liste des emails des utilisateurs et déjà le nom des rubriques de bases. Là rebelote, « Non, on a construit l’arborescence sur des bases scientifiques ! Par exemple pour développement durable, on a demandé à l’experte du sujet. Puis arrêter de prendre des cas particuliers (5 sur 40 !) pour montrer que ce n’est pas valable » Là montage de ton et encore blocage. Fin de l’atelier.

Qu’en conclure ?

  • Que si quelqu’un ne veut pas écouter, tous les arguments que tu peux avancer n’y feront rien. Ça ne sert à rien de perdre son temps avec lui.
  • L’ergonomie ou UX sont des notions qui ne sont pas partagées par tous. Le pire c’est que certains pensent savoir ce que c’est et comment le mettre en œuvre.

Auteur :

Lead UX designer en Freelance depuis le dernier millénaire ! J'aide à concevoir des services, des applications en étant centré sur l'utilisateur et ses usages.

11 commentaires

  1. Je me demande souvent si dans des cas comme celui-ci, ce n’est pas des tests utilisateurs, aka des personas devenues réelles qui doivent être observées dans leur manipulation théorique du site sans intervention extérieure. Afin que tout le monde constate ce qui se passe réellement.

  2. Karl, c’est clair, mais il faudrait que la MOA puisse se mettre dans une position d’accepter le fait qu’elle ne soit pas omnisciente et qu’elle ait besoin de cette information…

    La difficulté concernant les tests utilisateurs, c’est de démontrer leur pertinence. Et le meilleur moyen de démontrer leur pertinence est de faire un test utilisateur…

    On peut toujours agir en pirate, notamment quand on est ergonome interne (réaliser un test utilisateur avec des utilisateurs en formation, en prenant quelques voisins de palier), c’est plus difficile quand on est consultant parce que si le test utilisateur n’a pas été budgété (au niveau du temps à passer dessus), il y a peu de chances que cela puisse se faire…

    Mais cela me fait penser à un article que Rapahël a écrit sur d’autres façons de facturer des prestations chez ses clients… Peut-être serait-ce possible avec ce client de lui proposer d’organiser gratuitement un petit test utilisateur sur un proto/concept…

    Cela dit, dans le cas que décrit Rapahël, le concept ne parait pas suffisamment avancé pour cela… Un p’tit’ focus groupe peut-être ?

  3. Que si quelqu’un ne veut pas écouter, tous les arguments que tu peux avancer n’y feront rien. Ça ne sert à rien de perdre son temps avec lui.

    Par rapport à ce point là, quelles en sont les conséquences ?
    Par exemple, pour un projet web, est ce que comme il y a du avoir signature du contrat, faut il accepter de ne pas pouvoir convaincre les clients ? Et donc réaliser une interface faisant un compromis entre ce que veulent ces clients et les règles ergonomiques de bases ?

  4. Justement je me posais la même question que Maire.

    Raphaël, quand tu dis « Ça ne sert à rien de perdre son temps avec lui. » tu entends quoi exactement, difficile de mettre fin à une preste aussi sèchement, et surtout ça risque de poser problème à l’avenir.

    J’ai moi aussi été confronté à ce genre de cas, mais indirectement, je n’ai jamais eu à le gérer moi même, mais je n’ai jamais vu une manière de procéder qui me semble acceptable pour le client et pour l’équipe usability.

    • Là, la situation a été gérer par le chef de projet. Il a arrêté les ateliers. J’ai continuer d’intervenir sur les spécifications du service, pour l’aider, notamment, à avoir une idée claire de l’ensemble du site demandé. Puis de là, il l’a dégradé en fonction des demandes du client. Je pense que dans ce cas là il faut passer en mode « undercover », « fourbe ». Tu fais des choses sans le dire et sans que la MOA le voit. Il est prévu, par exemple, de faire des tests utilisateurs informels en présentant une version beta à un groupe restreint.

      Il y a eu d’autres (2 ou 3 en 13 ans) cas ou ça c’est terminer autrement. Je me souviens d’un cas où l’équipe (2 ou 3 consultants, payé par une autre direction) qui devait rédiger les specs fonctionnelles, avait une idée précise et ne voulait pas en changer. Le soucis c’est que la MOA (qui me payait) était d’accord avec moi, donc ça c’est fini par une réunion de « dézinguage façon puzzle » avec des cris, des larmes etc… C’est remonté haut et retombé fort (pas sur moi).

      Un autre projet, où j’ai simplement dit que je ne pouvais plus travailler dans ces conditions et donc j’ai arrêté ma prestation. Le projet à continuer sans moi, sans trop d’ergo avant d’accoucher d’une souris.

  5. Récemment j’ai eu l’occasion de suivre une mini-conférence d’une consultante en transformation des organisations.
    Elle nous a exposé « la stratégie des alliées » qui permet de catégoriser la posture des différentes personnes vis à vis d’un projet/objectif. Cette méthode donne des clés de comportements à adopter face aux différents profil .

    Voir cette petite présentation trouvée sur le net qui résume le concept:
    http://www.ergesis-solutions.com/wp-content/uploads/2011/06/ERGESIS-analyse-de-situation-strat%C3%A9gie-des-Alli%C3%A9s.pdf

    Au final il y a la dedans 2 messages forts :
    – Ne pas perdre de temps et d’énergie à essayer de convaincre les opposants
    – Chouchouter et cultiver les alliées

    si ça peux aider …

  6. Oui mais si les alliées n’ont aucun pouvoir décisionnel ?

    • Là on touche à ce que j’ai entendu appeler la « vente stratégique ». Il ne s’agit pas simplement de vendre une prestation, mais de la vendre aux bonnes personnes…
      Il faut aussi voir quels sont les objectifs du consultant au niveau commercial… S’agit-il de répondre à une prestat parce que l’on a besoin d’avoir un peu de liquidité pour faire face aux cotisations à venir, ou bien souhaite-t-on pérenniser la relation commerciale.
      La question qui peut se poser alors serait de savoir comment identifier rapidement (et donc de façon peu coûteuse) qui peuvent être les alliés et quels sont ceux qui ont un pouvoir décisionnel avant de rédiger la propal. L’analyse systèmique est là pour nous aider, mais il n’est pas possible de la mettre en oeuvre alors que c’est elle qui pourrait conditionner la propal… Faire payer l’analyse stratégique au client pour pouvoir mieux identifier si le client « vaut le coup » qu’on s’accroche un peu ou pas…

      La vie du consultant *indépendant* ne doit pas être facile tous les jours. D’un autre côté, si on se plante sur une prestat, au moins, ce ne sera pas à cause du commercial qui l’aura « mal » vendue…. 🙂

      Mais là je sors quand même pas mal de la thématique du billet de Raphaël, que je remercie au passage de nous faire profiter de tout ça.

    • Raphaël disait : « Je pense que dans ce cas là il faut passer en mode « undercover », « fourbe ». Tu fais des choses sans le dire et sans que la MOA le voit. Il est prévu, par exemple, de faire des tests utilisateurs informels en présentant une version beta à un groupe restreint. »

      Oui, même en mode « Guerilla » dit Jakob Nielsen :
      http://www.nngroup.com/articles/guerrilla-hci/

  7. Selon moi, il faut sortir de la mission le plus diplomatiquement possible (mais je n’ai pas encore réussi à identifier ce qu’était ce « plus diplomatiquement possible »).

Les commentaires sont clos.


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