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Innovation et invariant.

Il se trouve que mon activité professionnelle m’amène à recevoir régulièrement des demandes qui sont exprimées plus ou moins de la manière suivante :

« Voila, on crée un nouveau service super plus mieux, il nous faut donc une interface innovante, qui permette de faire ça, ça et ça puis ça aussi et accessoirement ça. Mais bien sûr pas question de faire comme les autres, il nous faut une IHM complètement révolutionnaire et parfaitement ergonomique (sinon vous ne seriez pas là…) ».

Je force un peu le tableau mais à peine. Dans cette situation, je suis bien obligé d’expliquer quelques fondamentaux, que je vais reprendre ici.

Les invariants.

Malgré ce qu’on aimerait bien nous faire croire, il y a des choses qui n’évoluent pas ou très peu sur l’échelle de temps qui nous intéresse (5 à 10 ans).

En particuliers dans le domaine du facteur humain, la physiologie et les capacités cognitives n’évoluent pas. Par exemple :

  • La taille d’un téléphone est et sera toujours conditionnée par la distance entre l’oreille et la bouche, ainsi que par la taille de la main et la taille du bout des doigts pour les touches.
  • Des notions de psychologie, comme l’empan mnésique ou la théorie de la Gestalt , sont aussi bien valables pour la chasse, compter le bétail dans un champ, la liste des courses que pour le menu d’un site web.

En matière d’ordinateur, le triptyque clavier, écran et souris (ou dispositif de pointage) reste la référence en matière de moyens d’interaction associés à une interface WIMP. C’est sans doute lié au fait que nous nous exprimons à travers un langage écrit et que les interfaces WIMP se basent sur des principes de psychologies (métaphores, notion d’objet,…). Les services doivent donc passer à travers cette moulinette.

Les autres périphériques (tablette et autres écrans multi-touch) resteront en marge, dédiés à des usages particuliers au moins pour les quelques années à venir. Le web n’est qu’un sous-ensemble réduit des interfaces WIMP.

Les différents types d’interfaces ne sont d’ailleurs pas légions, on peut les lister ici :

  • les interfaces WIMP. (exemple : Windows, Mac OS X)
  • Les interfaces hiérarchiques. (exemple : iPod)
  • Les interfaces textes. (exemple : Minitel)
  • Les interfaces en lignes de commandes. (exemple : Unix)

En dehors de ces quatre types d’interfaces qui ont fait leurs preuves, point de salut ! Il existe bien quelques autres types d’interfaces mais pour l’instant, elles ont du mal à sortir des laboratoires. On observe aussi quelques hybridations entre ces différents types d’interface, mais ce n’est généralement pas très heureux.

Innovation, non, évolution, oui !

Il reste la question des usages ou de l’activité. Les usages répondent généralement à un besoin. Nous ne parlerons pas de l’origine de ce besoin, mais tant qu’il persiste, l’usage persiste aussi. Mais pour un même besoin, les usages peuvent évoluer et prendre différentes formes.

Dans ces conditions, il paraît difficile de réellement innover. Mais, il est toujours possible de faire évoluer les usages.

Par exemple, dans le cadre de la musique, il fut une époque lointaine où l’on enregistrait, sur des cassettes, les chansons à partir de la radio (Acquisition), copiait d’une cassette sur l’autre (Gestion), avant de l’écouter sur son walkman (Ecoute). Puis vint le temps des CD, de la musique numérique, on encodait ses CD sur son ordinateur et gravait des « compils ». Internet, les premiers lecteurs MP3, puis l’iTunes music store, iTunes et l’iPod . On retrouve là, les 3 phases d’acquisition, de gestion et d’écoute de la musique, mais l’usage a évolué. L’utilisateur a changé ces usages pour gagner en efficience.

Donc, il est possible de faire évoluer les services, de les transposer sur de nouveaux médias, pour améliorer des usages existants. Par contre, le service ainsi transposé doit se conformer aux standards du média d’arrivé.

Et l’innovation ? la vraie ?

ancetresouris

Le premier libellé “cut” et “paste” écrit à la main pour tester l'idée.

Quand on parle d’innovation, il faut préciser que l’innovation doit créer une rupture, une nouveauté par rapport à l’existant. Nous parlons bien de rupture en terme d’IHM, et non en termes de services ou de contenus. Pour créer les conditions de cette rupture, il est souvent nécessaire d’investir assez lourdement en recherche et développement. L’exemple type était le Xerox PARC qui a investi pendant plusieurs années dans des équipes de chercheurs ce qui à abouti notamment aux interfaces WIMP.

Sans aller jusque-là, il est souvent nécessaire de faire travailler plusieurs spécialistes sur un sujet, pendant plusieurs mois pour avoir une idée ou concept suffisamment novateur et abouti pour être brevetable.

Il faut aussi prendre en compte que l’utilisateur devra apprendre à se servir de cette nouveauté, ce qui n’est pas toujours évident.

En conclusion.

La demande d’une IHM innovante est souvent inversement proportionnelle à la qualité et la maturité du service lui-même. Si votre service est réellement pertinent, une IHM des plus classiques le rendra d’autant plus accessible à tous et facile à prendre en main. Il faut donc savoir que l’innovation en terme d’IHM est semblable aux autres secteurs. Elle nécessite d’y consacrer du temps avec des personnes compétentes et donc de l’argent.

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Photo : Nicolas Zurcher dans Designing Interactions, Bill Moggridge, p66.

Auteur :

Lead UX designer en Freelance depuis le dernier millénaire ! J'aide à concevoir des services, des applications en étant centré sur l'utilisateur et ses usages.


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