Avec l’expérience, j’interviens de plus en plus sur du conseil et notamment sur de l’organisation d’ateliers de conception. Le but de ces ateliers est de concevoir ensemble, avec les différents acteurs du projet et aussi les utilisateurs finaux dans un cadre professionnel, tout ou une partie du projet. Ce type d’atelier a aussi d’autres objectifs comme recueillir les besoins ou les règles métiers, évangéliser sur l’UX ou améliorer la cohésion d’équipe.
Alors, comment fait-on ?
Déjà, l’atelier n’est qu’une étape dans le processus de conception de l’expérience utilisateur. Il est souvent précédé par des étapes de recherche utilisateur et suivi de phase de conception détaillée.
Je vous donne tout de suite la formule magique pour faire un bon atelier :
- Un zeste de pédagogie
- Une cuillère de ludique
- Un soupçon d’UX
- Une bonne dose d’exercices et d’idées
Voila, c’est tout, vous êtes bien avancés !
Comme c’est presque Noël et le début de l’année, je vais être un peu plus précis.
Pour le zeste de pédagogie, il est nécessaire d’expliquer clairement où vous voulez aller et la méthodologie que vous appliquez et si besoin situer l’atelier par rapport à l’avancement global du projet. La pédagogie passe aussi par l’enseignement de notions de bases en UX, en psychologie ou en conception d’IHM. Un des objectifs aussi de transférer de connaissances vers l’entreprise pour laquelle vous travailler. Ce transfère n’aura peut être pas d’effets immédiats mais il permettra de faire avancer le niveau de l’entreprise et les suivant vous remercierons.
L’aspect ludique des ateliers est important pour maintenir l’attention des participants mais aussi pour faire passer certaines notions en les mettant en situations. Un des objectifs des ateliers est aussi de construire un point de vue commun pour les équipes. Les jeux permettent de sortir les utilisateurs de leurs rôles habituels. Ça évite qu’ils s’arc-boutent sur leurs positions techniques, marketings ou autres.
Pour l’UX, c’est un peu le nerf de la guerre et donc c’est au centre de la méthodologie des ateliers. Les techniques pour animer les ateliers sont relativement nombreuses, mais il faut les utiliser à bon escient. La difficulté est souvent de faire le lien entre eux et de faire en sorte que le déroulement soit fluide, que ça raconte une histoire aux participants.
Pour les exercices et les idées, il faut arriver à mélanger des exercices classiques de types persona, user journey, avec ceux créés en fonction des besoins du moment. C’est là ou les choses se jouent pour faire des ateliers fluides.
Quelques exemples d’ateliers
Je vais essayer de vous donner quelques exemples d’atelier en fonction d’un contexte et qui se déroule normalement correctement.
Recherche utilisateur et conception de service.
Cet atelier, sur une journée, a pour objectif de faire comprendre la nécessité de prendre en compte les besoins et l’expérience des utilisateurs pour concevoir un service. Il se déroule de la manière suivante :
- Entretien utilisateur sur le thème de la journée (Si vous n’avez pas de sujet imposé, les transports en commun ça marche bien) par groupe de 3 ou 4. Donc une petite présentation sur les entretiens, puis 10min de préparation des questions puis chacun passe dans le rôle d’interviewer, interviewé, observateur, en 10 minutes par interview.
- Pour analyser les entretiens, les participants construisent des axes d’usages puis des matrices.
- De là, on peut faire des regroupements et en extraire des persona.
- En bonus, s’il y a assez de temps, il est possible de présenter la journée type, ou l’histoire du persona avec des legos.
- Puis après il faut réaliser une « Product box » toujours sur le thème des transports avec par exemple « l’abri bus du futur ». L’idée de la product box est de représenter sous la forme d’une boîte, type boîte de céréales, le service attendu. Pour la conception, j’intègre les ux cards de Carine Lallemand chaque groupe en sélectionnent deux en fonction des attentes d’un persona et essaye de trouver toutes les fonctions possibles et imaginables. Pour faire le tri un rapide jeu d’enchère (chacun à X € et mise sur les fonctions qu’il juge importantes), ou un simple vote suivant le temps disponible.
- Et enfin concrétisation de la box, puis présentation aux autres groupes.
Comprendre l’activité réelle d’un utilisateur et concevoir
Cet atelier plus court a pour objectif de retracer la journée type d’un utilisateur et si besoin d’essayer de construire un outil de suivi d’activité ou un tableau de bord. Il se déroule de la manière suivante, sur une demi-journée :
- Une introduction brève sur la différence entre activité prescrite et activité réelle
- La prise en main de persona très peu détaillés, que les participants vont juste compléter pour se les approprier.
- La création de la journée type d’un utilisateur, avec différentes actions qu’il fait normalement dans la journée. On réalise ça sous la forme d’une timeline en post-it.
- Introduire des perturbations : vous introduisez des événements sous la forme de cartes « L’application machin tombe en panne. » « Une personne au guichet fait un malaise ». On réorganise la journée en fonction de ces événements.
- À partir de-là, on prend chacun des post-it on voit ce qui concerne le tableau de bord ou non. Pour ceux concerné, on les classe par fréquence d’usage ou criticité.
- Ça donne les différents blocs du tableau de bord et leur ordre.
- De là, on détaille chaque bloc.
Quelques idées en vrac pour organiser tout ça
Au-delà du déroulement des ateliers, il y a quelques trucs qui peuvent aider.
- Faire critiquer les solutions d’un groupe par un autre groupe, puis faire tourner les groupes. Le groupe reprenant le travail d’un autre en suite pour l’améliorer et le continuer.
- Chaque groupe présente son travail à tour de rôle. Les autres peuvent critiquer mais uniquement en posant des questions. Cela évite les critiques trop directes et oblige à réfléchir avant de poser la question.
- Prévoir une phase d’idéation, puis une phase de tri des idées, avant de finir sur une phase de convergence et de consolidation.
- Pensez aux pauses, toutes les deux heures ! Comme sur la route, pour les mêmes problèmes d’attention.
- Prévoir un icebreaker, un exercice pour se mettre en route et faire en sorte que les participants fassent connaissance. Ça ne doit pas durer plus 10 minutes et être assez ludique mais aussi sortir un peu de la zone de confort. Par exemple, vider ses poches et en expliquer le contenu, dessiner rapidement quelqu’un du groupe, dire son superpouvoir et sa kryptonite.
Des fois ça marche, des fois ça ne marche pas.
Oui, des fois ça marche et puis la fois d’après on fait le même atelier avec un public semblable et ça ne marche pas ou pas aussi bien. On ne sait pas trop pourquoi. Ce que j’ai pu observer que :
- Il faut éviter de cassure dans le rythme et le processus de conception. Si vous partez sur une première piste de conception, puis un moment vous prenez un autre angle d’attaque, ça va être difficile de faire converger les deux.
- Des choses évidentes pour vous, ne le sont pas pour les autres. Dès que vous demandez aux participants de concevoir des choses et de les dessiner ça va devenir compliqué pour pas mal de monde. Ils font donc donner des aides, voir tenir le crayon ce qui est un peu dommage dans bien des cas.
- Ça marche, ça ne marche pas. Il faut parfois peu de chose pour que ça ne fonctionne pas, un participant grognon ou boulet. Des groupes mal assortis. Et des fois on ne sait pas pourquoi ça ne marche pas.
- Changer de stratégie à la volée, et changer le plan de l’atelier en cours de route, c’est possible mais risqué. « Y en a qui ont essayé » Il faut le faire quand vous voyez que ça bloque ou que ça va droit dans le mur, mais c’est souvent trop tard. Dans ces cas, je conseille d’utiliser le temps d’une pause pour revoir le plan et peut-être en discuter avec certains de vos interlocuteurs.
Pour finir
Oui, pour finir un atelier je vous conseille de faire un ROTI (Return on Training/Time Investment) de manière très simple. chaque participant lève la main en notant de 0 à 5 l’atelier. 0 : il a perdu son temps, 5 : il est super content. Vous comptez rapidement le nombre de doigt levé et vous faites la moyenne. En dessous de 3, vous pouvez largement vous remettre en cause.